An Allez Round — Témoignages des anciens joueurs
Depuis 2008 les membres de l’association Awen Brendaouez effectuent un travail de recherche autour d’un vieux jeu de quilles qui paraît spécifique au secteur. Le nom attesté est An Alez Round et se dissocie du jeu de la Quille du Léon notamment par la construction d’un muret de pierre. Il s’est joué à Brendaouez jusqu’à la dernière guerre sur un jeu se situant prés du four actuel. Nous avons des témoignages assez précis sur les règles de jeu. Marie Thérèse Letty avait encore une des quilles voir une boule… Il est donc possible de retrouver ce jeu de manière assez crédible et assez juste.
Les bénévoles commencent par récolter les témoignages de vieux joueurs puis, en allant visiter des endroits ou l’on jouait a ce jeu, relèvent des plans avant de commencer en 2008 la construction d’une nouvelle aire de jeu sur la place du village de Brendaouez.
Voici le compte rendu des recherches.
Témoignage de Jean Louis Gouez
Je suis originaire du manoir du Curnic et je me rappelle d'avoir joué à ce jeu de quilles quand j'avais 17-18 ans. C'est le jeu qui se trouve juste à coté du calvaire de St Jean. Les quilles étaient placées au bout, 5 ou 6 d'environ 50cm. Je ne sais plus comment elles étaient disposées.
C'était une grosse boule avec de quoi mettre les doigts trois ou quatre pour donner de la force elle pesait dans les dix kilos. Il fallait beaucoup de force pour jeter la boule et lui donner assez d'élan pour qu'elle fasse le tour sans toucher terre. Elle était arrêtée avec les quilles au sol, ou par les pierres. On la jetait à mi hauteur du talus et elle ne devait pas toucher terre avant les quilles.
Les gens misaient de l'argent comme sur les autres jeux de quilles… Oh pas grand chose… et c'est celui qui avait fait le plus qui raflait la mise. C'est un jeu qui n'était jouer que le jour du pardon de St Jean. C'était un jour férié ici dans le coin. Il y avait deux bistrots du Leuré qui s'installaient. Tout le monde du quartier y venait. Après notre mariage il n'y a plus eu beaucoup. Le dernier c'était en 68. Après il n'y a plus eu de chance ici pour le quartier.
La fête c'était ici prés du calvaire non pas du coté de l'ancienne chapelle. Elle a été déplacée à Kérouzern avec toutes les pierres ils ont fait la chapelle St Claude.
Témoignage de Jean Louis Breton
Il se jouait lors de la fête du quartier le jour du pardon de Brendaouez. An Alez round c'était le nom du jeu. Il n'y avait qu'une seule allée comme celle là; et 4 ou 5 allées de c'hoari quilliou le jeu plus courant. C'était des privés qui venaient avec leur matériel. Celui qui fournissait se mettait aussi plein les poches. Je me rappelle de la famille Gervez de Loc Brévalaire. Son fils François vis toujours il était mécano, avec lui tu auras aussi des renseignements. On jetait la mise par terre et il se mettait dans la poche. On faisait rampo (ex aequo) entre tous ceux qui avaient fait le même nombre de quilles et l'on partageait la mise.
L'allée était sur le terrain des Balcon. C'était une friche sur la butte. L'allée se trouvait à peu près à l'emplacement du four actuel; mais au moins 6m au dessus. Elle était faite de pierres hautes mises bout à bout pour former un mur vertical. Il fallait beaucoup de force et d'adresse pour jeter la boule; presque de la dimension d'un ballon, avec un trou dedans pour y mettre le pouce un peu comme le bowling.
On prenait de l'élan. De mon point de vue on devait pouvoir jouer des deux cotés, gaucher ou droitier. Les quilles étaient disposées de façon régulière le long du mur avec une certaine distance. Elle faisaient environ 40 à 50cm pas besoin de faire l'arrondi ici c'était grossier, et avec tous les chocs quelles recevaient… La trajectoire idéale était juste au sommet des quilles afin de les tomber mais sans perdre de l'élan . Sinon la boule restait coincée avec les quilles tombées.
Ici c'était un oncle à Michel Bervas qui était le champion. On jouait le jour du pardon toute la journée mais le jeu s'arrétait pour les vêpres, les curés n'aimaient pas trop. Il y a eu un qui est venu jeter les quilles par terre avec le pied.
Nous le lundi matin on se levaient tôt pour venir fouiller dans la poussière à la recherche des dernières pièces. Après guerre le terrain a été totalement transformé; il a servi de carrière de pierres et de sable de mine.
Témoignage de Yves Abjean
J’avais 21 ans à la fin de la guerre. 84 ans au moment du témoignage en 2009
C’est à peu près dans ces années là que je me souviens de voir jouer ce jeu de quilles appelé en Alez round. J’ai joué, mais un peu entre nous les jeunes, mais dès que les caïds venaient on leur laissait la place. C’est des gens de 50 ans à peu près qui y jouaient. Il fallait être costaud pour y jouer.
Il y avait 7 quilles disposées le long du mur à 10cm du mur. De mon point de vue, il aurait été plus juste de les éloigner plus, un peu le rayon de la boule. Les deux premières étaient posées d’abord et les autres à distance plus grande par la suite. Elles avaient 40 cm de hauteur. La boule environ 30cm; plus grosse qu’un ballon de foot. Elle n’était pas très ronde avec tous les chocs. Elle devait être faite simplement dégrossissant un carré de bois avec des outils à main. Des trous pour trois doigts et un devant pour le pouce. On jetait la boule assez haut pour prendre les quilles en hauteur et elle roulait le long du mur. On faisait aux mieux 6 voir 7 les meilleur. On misait pareil que pour l’autre jeu (quilles du Léon). Une mise initiale, qui doublait par la suite. Pour rejouer entre les ex aequo. Les joueurs étaient plutôt des je m’en foutiste qui misaient tous leurs sous, si bien qu’en fin de journée ; ils étaient obligés de chercher quelqu’un pour miser pour eux pour pouvoir continuer. Ce jeu- là n’était joué que le jour du pardon. Il était fait en creusant dans le coteau (pente du champ).
Chez nous à Kerhornaouen il y avait une grange avec le jeu de quille droit. C’était une grange faite pour ranger les charrettes, des branches recouvertes de fagots ou de fougères refaites tous les ans.